Le refuge Napoléon du col de Manse, en hiver
Napoléon Ier, dans son testament, a souhaité léguer la moitié de son domaine privé « aux villes et campagnes d’Alsace, de Lorraine, de Franche-Comté, de Bourgogne, d’Ile-de-France, de Champagne, Forez, Dauphiné qui auraient souffert par l’une ou l’autre invasion ». Trente-quatre ans après la mort de son aïeul, Napoléon III chargera une commission d’interpréter son testament et de répartir les fonds disponibles. Les Hautes-Alpes feront partie des 26 départements à recevoir 50.000 francs.
Jean-Pierre Jaubert explique que la commission choisit de consacrer cette somme « à une institution durable de bienfaisance qui perpétue au cœur des populations le religieux souvenir dont Napoléon Ier les a honorés ». Le conseil général des Hautes-Alpes, consulté sur le sujet, voulut que cette somme soit « placée provisoirement en rentes sur l’Etat et le revenu employé en bourses ou demi-bourses, en faveur d’aveugles et de sourds-muets pauvres du département ». Mais aucune demande de bourse ne fut fait pour des aveugles et seuls huit sourds-muets furent placés dans une institution.
Ainsi, en 1856, le préfet des Hautes-Alpes Alexandre Lepeintre eut l’idée de consacrer ce legs à la construction de refuges sur les principaux cols du département pour y accueillir « les malheureux surpris par la tourmente, ou arrêtés par les avalanches ». Les 50.000 francs permirent l’édification de six refuges (sur les huit prévus) : aux cols d’Izoard, Agnel, Vars, Lacroix, Noyer et Manse. Ces refuges, édifiés sur un modèle unique, furent achevés en 1858, et les dépenses dépassèrent largement les 50.000 francs. Quatre existent toujours : ceux de Vars, du Noyer, de Manse et d’Izoard.
Voici le refuge du col de Manse en hiver. A l'époque romaine ( 600 ans de présence à partir de -125 avant JC) la route Gap-Grenoble passait par là. La route du col Bayard (1248m) tout proche a été construite en 1786. Entre ces deux cols (Bayard et Manse) se trouve la plaine Bayard, appréciée des fondeurs.
Le col de Manse est le passage le plus habituel, le plus court, pour aller de Gap vers le Haut-Champsaur. Si l’autoroute Gap-Grenoble devait être réalisée, elle passerait par le Col de Manse…. mais pour l'instant, le projet est en suspens...
Dans le projet initial, le gardien devait donner asile à toute heure du jour ou de la nuitet et sonner la cloche, de quart d’heure en quart d’heure par temps de neige et de brouillard. Ces décisions, parties d’un bon sentiment se révélèrent finalement assez peu efficaces.
Construit sur le même modèle que les 3 autres encore debout (col de vars, col d'Izoard, col du Noyer), celui-ci est aujourd'hui un Bar-Tabac, très animé en été.
Photo du site Mémoire du Champsaur
Robert Faure, historien du Champsaur, rapporte les propos de Monsieur de Saint-Genies, témoin de la traversée du Champsaur par Napoléon :
« Un des plus beaux grenadiers du bataillon sacré avait disparu depuis le débarquement. On avait vainement cherché une cause à son absence lorsque ce problème s’expliqua peu d’heures après le départ de Gap. C’était dans la fertile vallée du Champsaur, non loin du berceau du connétable de Lesdiguières : la colonne défilait lentement au milieu des populations réunies sur la route tortueuse qui longe les eaux rapides du Drac. Les échos des énormes montagnes qui resserrent le bassin de ce torrent répétaient au loin les cris des villageois. Tout à coup la foule s’ouvre et laisse parvenir jusqu’aux pieds de l’empereur l’estimable déserteur portant dans ses bras un vieillard de 85 ans : c’était le père du grenadier qui avait voulu voir Napoléon avant de mourir. Cette scène touchante devait être le sujet d’un tableau que l’empereur avait commandé pour être placé dans son appartement ».
Les historiens ont fait des recherches pour tenter de trouver ce fameux tableau. C'est Mme Bois-Delatte, conservateur du Fonds Dauphinois à Grenoble (bibliothèque municipale) qui a retrouvé cette gravure, imprimée à Paris, chez Lesauvage, 6 rue de la Sorbonne. Elle a été dessinée par Mars et gravée par Leclère. Mais rien encore sur l'existence d'un tableau...
Sur la route du col, le "Chapeau de Napoléon"...
Carte "Mémoire du Champsaur"
***
A lire aussi :
Le refuge Napoléon du col de Vars, en été
Le refuge Napoléon du col d'Izoard, en automne
Le refuge Napoléon du col du Noyer au printemps