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20 septembre 2015

Jean Esprit Marcellin (1821-1884), statuaire (2)

 

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 En 1884, à la mort de Jean Esprit Marcellin, sculpteur né à gap en 1821, le maire de Gap, Frédéric Euzière, propose que la place Saint-Etienne de Gap soit rebaptisée place Jean Marcellin, et que, afin "de rendre un hommage plus éclatant à la mémoire de notre compatriote", soit édifiée "sur cette même place, avec l'aide d'une souscription publique, une fontaine monumentale surmontée d'un buste de Marcellin."

Le projet municipal prévoyait d'apposer une plaque de marbre dans une salle de la Mairie et de donner le nom de Marcellin à une des rues de Gap.

C'est une lettre de Madame Marcellin qui fait revoir le projet à la hausse.

Un comité pour l'érection du monument est désigné, et les souscriptions commencent à arriver en novembre 1884. Chaque commune des Hautes-Alpes participe tant bien que mal...les comités de Marseille, Lyon et Paris, réunissent laborieusement des sommes modiques...

La commande du buste est quand-même passée au sculpteur désigné par Madame Marcellin : Louis Jean Désiré Schroeder, ami de Marcellin et comme lui, ancien élève de Rude. Schroeder obtient un bloc de marbre de l'Etat, mais ne peut l'utiliser et le sculpteur doit en acheter un autre à ses frais, qui coûte 450 F. 

Marbre compris, le buste coûta 2850 F. La lenteur avec laquelle se réalisaient les ressources nécessaires, obligea le Conseil municipal à faire "appel à la générosité de la population gapençaise, soit au moyen de quêtes à domicile soit par l'organisation de tombolas, fêtes, etc."

 Cela ne suffit pas et le Conseil municipal décida dans la séance du 3 février 1889 "l'aliénation des propriétés communales provenant de la succession Marcellin" afin de pouvoir mener à bienl'érection du monument décidée le 10 août 1884... 

Ainsi, Marcellin allait payer de ses deniers une bonne partie de son propre monument !

Les devis, validations, décrets et autres autorisations obtenus, on peut changer la dénomination de la place Saint Etienne en place Jean Marcellin et l'érection sur celle-ci d'un monument commémoratif en son honneur.

Le 15 février 1892, Jules Basset, entrepreneur de travaux publics, signe la soumission par laquelle il s'engage à effectuer les travaux, Xavier Borgey entrepreneur de travaux de sculpture et marbrerie à Grenoble, s'occupera de la construction de la fontaine.

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La municipalité décide alors de ramener les délais de 4 mois à 2 mois et demi, afin que l'inauguration coïncide avec les fêtes du 14 juillet. Borgey ne peut donc pas livrer à temps les éléments décoratifs et il est procédé à la mise en place au sommet de la pyramide centrale en pierre rose de Guillestre, d'un socle provisoire en bois peint pour supporter et présenter durant la cérémonie d'inauguration, le buste de Marcellin par Schroeder.

Enfin, pour la fête du 14 juillet 1892, a lieu l'inauguration du monument inachevé. Les pompes de celle-là servent bien à celle-ci. Rien ne manque : foule nombreuse sur la place et aux fenêtres, pavoisement, guirlandes, écussons bleu-blanc-rouge, alternant avec les initiales de Marcellin, estrade, réception officielle, cortège, orchestre, hymne national, discours... L'Orphéon municipal entonne une cantate composée en l'honneur de Marcellin, et le soir un banquet est offert par la municipalité à une quarantaine de convives, et l'Orphéon reprend quelques couplets de la cantate...

 

Ce monument va pourtant connaître une bien triste et désolante aventure...

En 1933, à la suite d'une pétition adressée à la Municipalité par les habitants de la place, la fontaine est démolie et remplacée par un lampadaire... L'accroissement du marché et le besoin de palces de parking, ayant motivé cette pétition...

Le buste de Schroeder et les deux plaques furent déposées au Musée, puis le Conseil municipal décida de placer le buste sur son socle au jardin public de la Pépinière, près du Musée. Le Musée s'empare alors du problème et propose que le buste soit installé "dans l'axe de l'allée donnant accès au Musée (...) et d'une hauteur calculée pour ne pas masquer l'entrée principale du Musée".

En 1937, le buste est installé à l'est du Musée, la plaque commémorative reste au Musée, déjà vestige archéologique, fragment lapidaire d'un autre monde...

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Aujourd'hui, le buste de Jean Esprit Marcellin est déposé au sol, coincé entre un radiateur et l'escalier monumental, dans le hall d'entrée de l'Hôtel de Ville...

On peut s'étonner qu'à l'époque aucune voix ne s'éleva ni au sein de l'Association des Amis du Musée, ni de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes, contre cet acte de vandalisme officiel. C'était accélérer la chute de Marcellin aux oubliettes de l'histoire...

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La fontaine, quant à elle, fut installée à l'autre extrémité de la place.  Elle se compose d’un bassin octogonal en pierre de taille dans lequel l’eau s’écoule par quatre canons en fonte.

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 Tombe de Jean-Esprit Marcellin, cimetière du Montparnasse, division 8. (phot. Wikimedia)

Mais ce n'est pas fini...

Jean Esprit Marcellin est enterré au cimetière Montparnasse. C’est sur cette tombe, le 14 octobre 1884, que les amis du sculpteur décidèrent de fonder la Fraternelle des Hautes-Alpes à Paris. Les parlementaires des Hautes-Alpes, au premier rang desquels le sénateur Pierre Bernard-Reymond, étaient intervenus à maintes reprises afin de demander au maire de Paris l’attribution à la ville de Gap de la concession de la tombe du sculpteur gapençais afin de pouvoir l’entretenir. C’est finalement la ville de Paris qui a repris cette concession et l’a réhabilitée avec le concours financier de la Fraternelle, de plusieurs institutions et donateurs haut-alpins. Le député des Hautes-Alpes Joël Giraud, a participé en octobre 2014 au cimetière Montparnasse à Paris, à l’inauguration de la réhabilitation de la tombe du sculpteur gapençais Jean-Esprit Marcellin, aux côtés de son ami caturige Georges Dioque, actuel président de la Fraternelle des Hautes-Alpes à Paris.

Jean Esprit Marcellin (1821-1884), statuaire (1)

***

Source : Jean-Esprit Marcellin, Catalogue édité par le Musée départementl de Gap en 1992, rédigé par Gérard Brès.

L'e-media 05


 

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Commentaires
F
Bonjour, un article très documenté. La 2e partie du XIXe siècle était très "statuaire" à la gloire de célébrités locales ou de représentations allégoriques : Bartholdi, Rodin, Rude, on dirait que le XXe siècle a souvent fait tomber bustes et icônes ? Ici dans mon village on a une statue de la Liberté offerte à un élu du XIXe par Bartholdi, comme il n'y a beaucoup de curiosités, elle est bien toujours en place. L'art moderne (Buren etc..) est confronté aux mêmes problèmes, vieillissement, perte de fonctionnalité ! Et que dire de la destruction des antiquités en Mésopotamie ? Bonne journée.
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