L'église Saint-Romain de Molines-en-Queyras
L'arrivée à Molines se fait par une jolie route qui chemine dans la forêt de mélèzes ; dans un lacet de la route, la Demoiselle Coiffée, comme une apparition au milieu des feuillages d'automne...
"...Elle porte victorieuse le bloc noir de rocher, ancien jouet des glaciers, fêtant jour après jour le triomphe de la vie sur l'épopée glaciare" (Michel Blanchet).
Molines est une commune du Queyras qui compte un peu plus de 300 habitants. Elle est irriguée par l'Aigue Agnelle, descendant du col du même nom qui sert de frontière avec l'Italie. Aigue signifie "eau". Ses versants sont peuplés principalement de mélèzes qui ont la particularité de roussir en automne avant de perdre leurs "feuilles" en hiver.
Elle est composée de sept hameaux : Molines, la Rua, Gaudissard, Clot la Chalp, Pierre-Grosse (1926 mètres), le Coin et Fontgillarde (1990 mètres). Un huitième, Costeroux (2100 mètres) n'est plus habité depuis 150 ans.
L'histoire de sa célèbre église Saint Romain épouse celle du village et des vallées du Queyras (cf l'article sur le cimetière de Molines). Cette histoire a été écrite dans les "transitons de Molines", du nom donné aux chemins qui longeaient les canaux, cahiers où on notait l'état des canaux, mais aussi les faits marquants et surtout tragiques du village depuis 1469 jusqu'à 1908. L'église fut détruite pendant les guerres de religion et reconstruite entre 1628 et 1637. Les cloches sont apparentes en haut d'un clocher carré couvert d'une toiture en mélèze aprés la destruction de sa flèche (la plus grande du Queyras) au cours des guerres de religions. L'église a été rénovée en 2011.
Cadran d'angle (1849) attribué à Giovanni Francesco Zarbula, peintre cadranier piémontais du XIXe siècle. Il fut l'un des seuls cadraniers à dater et signer de ses initiales : GZF , ZGF ou ZJF, les nombreux cadrans qu'il réalisa dans les Hautes-Alpes de 1833 à 1870. Tous ses cadrans sont peints à fresque, avec des encadrements en escaliers peints en faux marbre.
La devise : "Ora ne te rapiat Hora" "Prie afin que l'heure ne te surprenne pas"
La construction de l'église remonte selon toute vraisemblance à la fin du XVe siècle. Elle a été conçue dans la tradition romane, avec une nef de trois travées couvertes d'une voûte en berceau en tuf appareillé et un choeur à chevet plat. Le porche qui protégeait le portail sud fut sans doute détruit pendant les guerres de religion. Les décors de la façade sud sont en cours de restauration.
Le mur en extérieur sud du choeur comporte deux baies entourées d'un décor architectural dessiné à la mine de plomb sur un fond blanchi à la chaux.
Au-dessus des baies, la dépassée de toiture abrite les restes d'une frise décorative assez rustique. Il s'agit peut-être des vestiges des premiers décors de l'église, lors de sa remise en état au début du XVIIe siècle.
Les chiffres que l'on peut lire sur le décor semblent correspondre à ceux d'un cadran solaire de conception particulière, sur lequel l'heure aurait été indiquée par l'ombre portée de la dépassée de toiture.
Ces photos ont été prises entre 11h30 et midi...
Attention ! Un portail peut en cacher un autre...
Le premier portail, sculpté de rosaces et de fleurs est typique de l'artisanat queyrassin, qui s'exprime dans les meubles, les objets de la vie quotidienne, les jouets mais aussi dans l'architecture. Expression culturelle d'une population isolée en hiver, qui se fait plaisir pendant les soirées de veillée en sculptant à l'aide d'outils rudimentaires, le pin cembro, au bois tendre.
Sur le deuxième portail, on peut voir des corniches en tuf sculptées de masques.
Avant d'entrer dans l'église, un bénitier en pierre,
Lui aussi au décor sculpté de masques.
La décoration intérieure de l'église Saint Romain de Molines a souvent été jugée "de mauvais goût" au XIXe siècle. Cette décoration très "baroque" est néanmoins exceptionnelle.
Comment ne pas être ébloui devant un tel décor réalisé en 1692 par le sculpteur Gégout puis repeint en 1754 ?
C'est un foisonnement de couleurs, de volutes, d'angelots aguicheurs, de dorures, de peintures et d'entrelacs de plâtre qui s'offrent au regard, sur l'arc et la voûte du choeur. (Cliquer sur la photo pour agrandir)
Dans le choeur un magnifique retable du XVIIIe siècle, sculpté par des artistes italiens de Saluces.
Indissociable du décor baroque de Gégout, cette représentation du Calvaire, sur l'arc triomphal, avec Marie-Madeleine au pied du Christ en croix, Marie et Jean de chaque côté.
Tous les personnages ont les yeux grands ouverts, même Jésus, Marie-Madeleine pleure dans un grand mouchoir... (cliquer pour agrandir)
Encore des anges sur ce vitrail en oculus, qui entourent la Vierge Immaculée
La statue de saint Romain : le 18 novembre, fête de saint Romain, le banc situé sous la statue est illuminé par un rayon de soleil qui traverse un vitrail,vers 13 h 15.
Chapiteaux en tuf.
La voûte en berceau du plafond et la tribune.
Contre les fonts baptismaux, s'appuie un brancard funéraire... L'Alpha et l'Oméga ?
Un beau chemin de croix moderne (via crucis), peint par André Massard
Et un chemin de résurrection (via lucis)...
œuvre récente d’un sculpteur sur bois, René Eyméoud.
Faisant le pendant au chemin de croix, évoquant la Passion, ce chemin se compose de quatorze tableaux sculptés retraçant les récits bibliques de Pâques à la Pentecôte.
http://www.diocesedegap.fr/presentation-de-la-via-lucis-de-molines-en-queyras/
Nous quitterons l'église par le portail ouest et son insolite décor peint...
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A voir aussi :
Le cimetière aux 3 oratoires de Molines-en-Queyras
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Eglise ouverte à la demande. Renseignements auprès de la Mairie de Molines ou à l'Office du Tourisme.