Le jardin historique de Mont-Dauphin
Ce matin, allons au jardin ! Et pas n'importe quel jardin : le jardin historique de Mont-Dauphin...
Sur un verrou glaciaire à la confluence du Guil et de la Durance, le plateau des Millaures (Mille vents) a été choisi par Vauban en 1692 pour y construire cette forteresse, maillon de la "ceinture de fer", alors que la région venait d'être dévastée par les victoires successives du Général Catinat sur le jeune Duc de Savoie. Il est question de verrouiller l'accès à la vallée de la Durance par les cols de l'Arche et de Vars, qu'avaient empruntés l'ennemi.
Le traité d'Utrecht en 1713 qui déplace la frontière, rendra cette forteresse inutile.
(D'après une maquette du livre : La place forte de Mont-Dauphin, de Nicolas Faucherre, Ed : Actes Sud, 2007)
Vauban avait aussi voulu en faire un village afin que les habitants puissent distraire les soldats en garnison. Il était prévu dans chaque parcelle d'habitation des jardins. Deux mares y furent même aménagées, conduites d'eau et puits, sur un plateau complètement dépourvu d'eau...
Un jardin historique a été aménagé depuis quelques années, à l'emplacement de l'ancienne cure, derrière l'église Saint-Louis, inachevée. Emmanuel Borel, le jardinier, y cultive des variétés anciennes de plantes potagères et médicinales, et surtout, il a retrouvé des plants de variétés régionales, comme le seigle barbu du Queyras, la fève de Vallouise ou l'arroche, épinard rose qui entre dans la composition des "oreilles d'âne".... Mais Kesako ? Des oreilles d'âne ???
Ce jardin est clos par le mur d'enceinte de l'ancienne cure. Il y eut peut-être un jardin ici. L'idée de la création de ce jardin était surtout de recueillir, cultiver, préserver des plantes locales, rares... historiques...
Comme ce seigle barbu du Queyras
Au milieu des iris noirs et des coquelicots...
L'arroche ou épinard rose, qui entre dans la composition des fameuses "oreilles d'ânes " du Valgaudemar, plat très ancien à base de lasagnes et d'épinards, cueillis quand ils atteignent la taille d'une oreille d'âne, ce qui explique son nom...
Ici, la fève de Vallouise, le haricot "merveille de Venise"
Le nombril de bonne-soeur entre les doigts du jardinier... Une variété de haricot avec une colombe sur l’ombilic. Une ancienne variété Française.
La célèbre pomme-de-terre du Queyras... Dans tout le Queyras, était cultivée une pomme de terre à épiderme jaune et une pomme de terre rouge, de grosse taille. Il y a bien longtemps, on cultivait aussi une pomme de terre bleue ou violette de très grosse taille et à la saveur excellente, dont on n'a pas retrouvé de trace. Cette culture dispose dans le Queyras d'un certain nombre d'atouts dont une terre légère et la présence réduite de parasites grâce à l'altitude. Elle arrive sur le marché en fin de saison (pommes de terre "nouvelles" en août) (Charte-de-la-marque-des-pommes-de-terre-du-parc-naturel-regional-du-queyras.)
L'idée, c'était aussi de cultiver ce jardin de manière raisonnée...
Avec compostage, utilisation de bois raméal fragmenté (BRF)
D'utiliser des engrais verts comme ici, la bourrache, l'ortie...
Le lin...
Cultiver des plantes légendaires : la mandragore ! Plante mythique du bassin méditerranéen, chargée de légendes et de fantasmes... de multiples vertus thérapeutiques, sédatives, anti inflammatoires, hallucinogènes... On raconte que son arrachage provoquait une mort certaine. C'est pourquoi au MoyenÂge, on l'attachait à un chien qui allait mourir plus loin...
Emmanuel Borel, jardinier passionné, vous racontera de belles histoires et vous apprendra beaucoup de choses sur le monde qui nous entoure et que nous ne voyons pas toujours, notamment, la Théorie des Signatures, méthode empirique d'observation du monde des plantes médicinales, selon laquelle la forme et l'aspect des plantes est à rapprocher de leurs propriétés thérapeutiques. Elle repose sur le principe similia similibus curantur "les semblables soignent les semblables"
Un exemple : les trois lobes des feuilles d'Hepatica nobilis ainsi que la teinte rougeâtre de la face inférieure, évoquent le foie et ont longtemps fait croire que cette plante était efficace dans le traitement des affections de cet organe, d'où son nom.
On trouve encore dans ce jardin des variétés rares dans notre département, comme la digitale rose. Ici c'est la digitalle blanche qu'on trouve dans les sous-bois.
Ceci n'est qu'un petit aperçu de cette très intéressante visite.
En été deux visites par jour, le matin et l'après-midi. http://www.montdauphin-vauban.fr/spectacle-festival.php
L'église Saint-Louis vue du jardin...
Vauban, soucieux à la fois d'économie et du bien-être des soldats, règla la quantité et la qualité de la nourriture et inventa sa fameuse "soupe au bled" (froment, lard, oignons, ciboules).
sans oublier l'épouvantail, qui vient compléter ma collection...
Une balade à savourer, au milieu de cette place forte Vauban, qui offre toujours des surprises... Spectacles, concerts, ateliers, conférences...
Et pour terminer, une vieille photo (certainement 1929 ou 1939) de la place forte de Mont-Dauphin, qui est toujours une commune où vivent 150 habitants. De la part de Patrice Bres, qui m'envoie cartes postales et vieilles photos, pour compléter mes sujets ! Merci !
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Tous les article sur Mont-Dauphin, à retrouver ICI (L'église, le puits, l'horloge...)