Toiles-Eau-Lumière
Textes et photos : Sylvie Chaudoreille ©
La nuit révèle une autre vie, la pluie aussi. Dans la rosée de l’aube, au réveil du brouillard, apparaissent quelquefois les toiles des fileuses, tels des pièges à lumières, des instruments à cordes, qui jouent avec les gouttes de l’instant.
Bien ancrée dans cette présence matinale, au tout petit lever de jour, l’araignée joaillère démêle ses fils de soie, tricote de ses huit pattes, et empaquette le paysage dans une grande roue.
Sans se perdre, elle danse dans le flou, entre les trouées bleues ; tout ne tient qu’à son fil. C’est le mariage de l’éphémère avec la poésie du point et de la ligne. Toute de perles et de faisceaux, sa guirlande se tisse, et l’artiste funambule, dans cette galaxie de rayons et de dentelle fine, se fabrique un hamac.
Tout l’univers est là, à hauteur d’émotion et de nos yeux d’enfants...
L’artiste de la brume, dans son petit tissé en gouttes de lumières qui contient l’infini, nous parle avec son fil, de ce qui nous attache, qui nous lie à la vie.
Il y a parfois lorsque le crachin bruine, sous le feuillage, ou adossé aux troncs, des balancelles fines qui embrassent le brouillard en ses bords pour nous faire un signe, imaginer un dessein ; une couturière minuscule et matinale, qui tend un mince fil en forme de destin entre notre monde et le sien.
Certains jours sont comme ça, l'invisible se courbe vers nous dans son extrême minutie, pour nous ouvrir le ciel en grand ; en devenant présence pure, il nous rappelle un sens de la réalité : oui, il est toujours là, cet immense besoin d'un plus petit que soi, d’une simple araignée parfois, qui soulève le voile derrière lequel on s’est caché.
Et lorsque le soir tombe, il y a dans nos chambres à coucher, des faucheux plus modestes encore, qui dressent quelques toiles, au chevet de nos nuits, pour attraper nos rêves et pour les protéger.
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Merci Sylvie...
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